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21 novembre 2010 7 21 /11 /novembre /2010 11:36

Au fil des siècles, la localisation de la capitale de l'antique empire de Babylone s'est perdue, seules les populations locales conservaient la mémoire de l'emplacement d'une cité puissante ensevelie sous les sables, desquels surgissaient parfois des tablettes de terre cuite, des cylindres mystérieux ou des briques colorées. Une colline, dénommée "Tell Babil" et située au nord de la cité, gardait encore une référence à cette capitale disparue.

 

Située hors des grandes routes, dans une région aride et peu hospitalière, le site de Babylone ne pouvait pas être découvert "par hasard". Les touristes du XVIIIe et XIXe siècles étaient invités, en guise de tour de Babel, à visiter une ziggourat du IIe siècle dans la proche périphérie de Bagdad, bien loin de l'emplacement réel de la ziggourat du temple de Marduk à Babylone qui fut l'inspiration probable du mythe biblique. Un lion de granit gris, à moitié enseveli, était, par contre, montré aux visiteurs qui venaient dans la région de la vraie Babylone.

 

Babylone AntiquePlan manuscrit d'une partie de la cité antique - 1920 environ

 

La redécouverte de Babylone se fait en plusieurs temps : les Français et les Anglais traversent la région, cartographient, interrogent, achètent des antiquités, émettent parfois des hypothèses, mais aucun n'identifie la localisation de la cité perdue.

 

Revenant de Londres où il avait pu observer de nombreux bas-reliefs que l'Angleterre avait découvert dans une Mésopotamie "abandonnée" des Français, le ministre de l'intérieur, Léon Faucher, fait voter à l'Assemblée Nationale, en août 1851, un budget de 78 000 francs pour financer une expédition scientifique et artistique en Mésopotamie.

 

L'expédition part de France au mois d'octobre 1851. A sa tête, le diplomate français Fulgence Fresnel (par ailleurs cousin de Prosper Mérimée et frère d'Augustin Fresnel, physicien a qui l'on doit des découvertes dans le domaine de l'optique), accompagné du docteur Jules Oppert (orientaliste et épigraphiste allemand), de Félix Thomas (architecte) et d'Edouard Perreymond (secrétaire-comptable de la mission).

 

La mission, fortement documentée, demeure célèbre par ses échecs. Du fait de retards liés à l'instabilité de la région, de sérieuses difficultés financières sont intervenues très tôt, ralentissant les travaux de fouilles qui avaient démarré en juillet 1852, et rendant difficile la vie quotidienne du groupe. A cela s'ajoutèrent les difficultés de communication avec les administrations françaises en charge du suivi de l'expédition, les ordres et contre-ordres et les demandes tatillonnes de justifications comptables.  Puis, la santé des uns et des autres a été mise à rude épreuve. Ainsi, Thomas, qui souffrait déjà d'hépatite avant sa venue en Babylonie, fut un jour pris de fièvre et d'un profond délire paranoïaque, ce qui le conduisit à faire feu sur un cheikh, persuadé que celui-ci voulait l'assassiner. On imagine les risques qui auraient pesé sur les occidentaux si Thomas avait réellement tué cet homme... Enfin, les relations entre les différents membres de la mission n'étaient pas les meilleures, surtout entre Fresnel et Oppert. Progressivement, l'équipe s'est délitée. Fresnel, malade, épuisé et découragé, demeurera à Bagdad jusqu'en 1855 où l'opium, la dysenterie et des problèmes circulatoires précipitèrent sa mort le 30 novembre. Pire encore, le matériel archéologique trouvé à Babylone, soit une quarantaine de caisses, sombra dans le Tigre le 20 mai 1855, près de Kournah, à la suite d'une énième tentative de pillage de l'embarcation sur laquelle se trouvaient les pièces.

 

Mais le bilan de l'expédition française, bien que peu glorieux, n'est pourtant pas négligeable : tout d'abord, la mission a permis d'identifier, grâce aux textes et objets découverts dans le kasr (tumulus artificiel qui s'élevait à l'emplacement du palais royal antique), que le site fouillé correspondait bien à la capitale de l'empire babylonien. De plus, ces recherches ont permis à Oppert de publier, à partir de 1859, des travaux importants relatifs à l'écriture cunéiforme.

 

Les conclusions de Fresnel, dans une lettre testament du 31 janvier 1855, démontrent que le chercheur, en plus de ne pas avoir su trouver les vestiges encore enfouis, se fourvoyait sur l'intérêt archéologique du site. En effet, il indiquait au ministre de l'intérieur que l'intérêt pour ce site était fondé sur une chimère ayant aveuglé les Anglais quelques dizaines d'années plus tôt. Pour lui, il n'y avait plus de bâtiment gigantesque ou de découverte majeure à faire sur ce site antique, le temps ayant fait son oeuvre.

 

Il se trompait...

 

 

Pour en savoir plus :

 

- Jules Oppert, "Expédition scientifique en Mésopotamie exécutée de 1851 à 1854", Tome 2, 1859
- Jules Oppert, "Expédition scientifique en Mésopotamie exécutée de 1851 à 1854", Tome 1, 1863

- Maurice Pillet, "L'expédition scientifique et artistique de Mésopotamie et de Médie - 1851-1855", 1922

 

16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 20:54

 

David Fincher - The social network

David Fincher - The social network

Crédits photographiques : SONY Pictures

 

J'avais cru voir plein de vilaines choses sur ce film, "The social network". L'histoire de la création de Facebook. Pas grave, le fait que David Fincher l'ait réalisé m'a suffit.

 

J'ai  trouvé ça très bien. Le personnage de Zuckerberg n'est pas aussi désagréable que d'aucun semble l'avoir vu dans ce film, mais je regrette un peu le côté lourdement nerd qui est dépeint de lui, d'autant plus que ce côté semble s'aggraver plus on avance. Autre chose, l'histoire du vol de l'idée du réseau social n'est finalement pas aussi nette que cela dans le film, mettant plutôt l'accent sur la dimension créative anarchique de Zuckerberg.

 

Bref, bon film, dynamique et esthétiquement intéressant. Mon avis à moi.

 

Et quand j'entends les commentaires politiques sur l'intervention télévisée de Nicolas Sarkozy, je ne regrette pas d'avoir passé plus utilement mon temps.

 

11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 21:20
 
La religieuse de Diderot
" On sonna les cloches pour apprendre à tout le monde qu’'on allait faire une malheureuse. "
Diderot, "La religieuse"
 
 
Couperin leçons de ténèbresFrançois Couperin, les Leçons de Ténèbres
Chants probablement connus par "la religieuse" lors son passage à Longchamp

 
A l'origine du roman de Diderot, un fait réel assez répandu dans la France du 18e siècle :  dans les familles nobles ou bourgeoises, il était assez courant qu'une fille née d'un amour extra-conjugal doive entrer dans les ordres pour racheter la faute de sa mère. De jeunes filles se retrouvaient ainsi cloîtrées à vie contre leur gré.

  
" Ma fille, car vous l'’êtes malgré moi, vos sœoeurs ont obtenu des lois un nom que vous tenez du crime, n’'affligez pas une mère qui expire ; laissez-la descendre paisiblement au tombeau : qu’'elle puisse se dire à elle-même, lorsqu'’elle sera sur le point de paraître devant le grand juge, qu’'elle a réparé sa faute autant qu'’il était en elle, qu'’elle puisse se flatter qu'’après sa mort vous ne porterez point le trouble dans la maison, et que vous ne revendiquerez pas des droits que vous n’'avez point. "
Diderot, "La religieuse"


Sur le plan économique, la famille trouvait un intérêt à une telle situation : la jeune fille cloîtrée ne constituait plus une charge courante pour le ménage (nourriture, entretien...), ne nécessitait plus que l'on constitue une dot et que l'on pourvoie à son installation (mariage) et, par quelques habiles manoeuvres, se retrouvait dépossédée de ses droits sur les héritages familiaux à venir.


Sur le plan moral, la famille bénéficiait d'une certaine tranquillité puisque la jeune fille "retirée" (cloîtrée de force plus précisément) pouvait vivre, du moins sur le papier, une retraite paisible, dans laquelle la communauté pourvoyait à tous ses besoins courants et, suprême bonheur, dans laquelle elle pouvait percevoir une petite somme d'argent pour ses besoins personnels ou pour ses vieux jours.  

 

 

Ah quelle tristesse
J'endure en ce couvent.
Mon coeœur plein de tristesse
Souffre mille tourments.
Une mère sévère
Met fin à mon bonheur.
Je suis au monastère
L'amour en est l'auteur.
 

Chanson populaire du 19e siècle


" Vous ferez ce que votre mère doit attendre de vous ; vous entrerez en religion ; on vous fera une petite pension avec laquelle vous passerez des jours, sinon heureux, du moins supportables. "

Diderot, "La religieuse"

 

Gueffier La Religieuse
" Me voilà sur le chemin de Paris avec un jeune bénédictin "
Gravure anonyme publiée en 1796 dans l'édition Gueffier de "La Religieuse"

 
"La religieuse" trouve ses racines dans un fait authentique, celui de soeur Marguerite Delamarre, illustration médiatisée de ce fait assez fréquent. Née en 1717 dans un famille bourgeoise parisienne, la jeune Marguerite, probablement née d'une relation adultère, se voit contrainte d'entrer en couvent en 1732 à l'âge de 18 ans "à la suite d'une sordide histoire d'argent" (Cf. Claude Aziza, "L'Histoire" n°325). La situation de Marguerite Delamarre fit parler d'elle dans les salons parisiens : en 1752, Marguerite introduisit une requête (procès) pour que ses voeux soient résiliés et qu'elle puisse reprendre une vie civile. Soeur Marguerite accusait sa mère de l'avoir forcée à entrer dans les ordres et de ne point avoir choisi son statut de religieuse. Sa requête fut rejetée en août 1756 et son procès définitivement perdu en mars 1758. Marguerite Delamarre a donc terminé sa vie sous le voile de religieuse.

Note : les sources en ma possession sont assez peu nombreuses. Il existe cependant des documents historiques assez précis relatifs au procès de Marguerite Delamarre.

Jacques Rivette - La religieuse 
Affiche du film "La religieuse" de Jacques Rivette


Près de 200 plus tard, à partir de 1965, cette histoire refait parler d'elle. Le cinéaste Jacques Rivette décide en effet de mettre en scène "La religieuse". Immédiatement, des associations engagent le bras de fer pour obtenir l'interdiction pure et simple de ce film à venir : on citera notamment l'association des parents d'élèves de l'enseignement libre ou encore l'union des supérieures majeures. Wikipédia cite un échange épistolaire entre la présidente de cette dernière et l'exceptionnel ministre de l'information Alain Peyrefitte :

La présidente de l'Union des supérieures majeures : « Un film blasphématoire qui déshonore les religieuses ».
Alain Peyrefitte : « Je partage entièrement les sentiments qui vous animent »
.


Le tournage du film est rendu difficile par quelques décisions techniques de l'Etat (refus de tournage dans un bâtiment relevant des monuments historiques) mais parvient néanmoins à son terme.

La commission de contrôle (la "censure") rend un avis favorable à l'exploitation mais propose l'interdiction aux moins de 18 ans. Le secrétaire d'Etat à l'information (qui a remplacé le fantastique Alain Peyrefitte, paix à son âme) réunit une nouvelle fois la commission de contrôle et leur explique que la projection de ce film pourrait provoquer des troubles à l'ordre public et qu'un avis défavorable à l'exploitation serait le bienvenu. La commission persiste sur son avis favorable. Qu'à cela ne tienne, l'avis de la commission n'est que facultatif, et le Ministre Interdit le film. Godard, avec inspiration, interpelle André Malraux dans le Nouvel Observateur : "Monsieur le ministre de la Kultur".

Le film est projeté à Cannes en 1967... et tout se passe bien ! Le film est accueilli chaleureusement et l'on se rend compte qu'il est austère, simple et très fidèle à l'oeuvre de Diderot. Les lobbies religieux n'auraient-ils pas cherché à faire passer une oeuvre philosophique, au même titre que celle de Diderot, pour un scandaleux pamphlet anti-catholique ?
 
L'interdiction ministérielle est annulée par la Justice administrative et le visa d'exploitation délivré à compter de l'été 1967. Record d'entrées, republication de l'ouvrage de Diderot. L'agitation réactionnaire a obtenu l'effet inverse à celui recherché.

La bataille de 1967 entre intégristes catholiques (sous faux nez, certes) et artistes reprenant une oeuvre philosophique critique (rappelons-nous quand même qu'il ne s'agit pas de critiquer l'Eglise pour le seul plaisir de le faire, l'affaire Delamarre a bel et bien existé) est la continuité d'une bataille historique entre traditionalistes et progressistes et que l'on peut résumer par : "Peut-on critiquer librement les religions ?".

Le texte intégral de "La religieuse" de Denis Diderot est librement accessible sur le site de Wikisource.

Oeuvres évoquées :
- Diderot, La religieuse (écrite en 1760, publiée en 1780 en feuilleton puis en 1796 en oeuvre intégrale)
- "Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot", film de Jacques Rivette sorti en 1967

10 novembre 2010 3 10 /11 /novembre /2010 04:55

 

Le Conseil pour la diffusion de la culture économique a élaboré un test pour permettre d'évaluer les connaissances en économie puis l'a soumis à un panel de français. Le bilan n'est pas excellent...

 

La note moyenne obtenue est en effet de 8,3 / 20, la catégorie sociale la plus diplômée (2e ou 3e cycle) , qui obtient les meilleurs scores, atteint une moyenne de... 10,5 / 20 !

 

Bref, y'a du boulot !

 

Pièce de 1 euro de la SlovéniePièce de 1 euro de la Slovénie

 

 

Une version 2 du test est disponible en ligne : cliquez ici pour passer le test Kezeco

Ce quizz sur l'économie est constitué de 27 questions, il faut compter un peu plus de dix minutes pour le faire en entier. A l'issue du questionnaire, il faut entrer ses coordonnées (utilisez des coordonnées bidons pour éviter le fichage) et son adresse mél (une adresse temporaire) à laquelle vous sont immédiatement envoyés vos résultats et le corrigé.

 

J'ai passé le test : les questions sont d'un niveau moyen de difficulté, nécessitent une culture économique correcte et un peu de réflexion. Il parait que je suis "un crack"... s'ils le disent ;)

 

7 novembre 2010 7 07 /11 /novembre /2010 11:11

 

Je vous en parlais sur ce blog en juillet 2008 : le site archéologique de Pompéi n'est pas en bon état.

 

Et bien un édifice, "la maison des gladiateurs", s'est tout simplement effondré ce 06 novembre 2010.

 

Pompei la maison des gladiateurs

Effondrement de la "maison des gladiateurs", via dell'Abbondanza, à Pompéi (Italie)

Crédits photographiques : Agence France Presse

 

La fonction de cette maison, dont le nom latin est "Schola Armaturarum Juventus Pompeiani", n'est pas certaine mais les historiens pensent qu'elle était utilisée par les gladiateurs pour leurs entraînements et pour entreposer armes et armures.

 

La maison était recouverte de fresques d'inspiration militaire : victoires ailées, trophées, palmes, emblèmes...  On ne sait pas si certaines d'entre elles pourront être préservées, mais il est probable qu'il y a eu des destructions.

 

Les causes de l'effondrement ne sont pas encore connues, mais il semblerait que les pluies importantes qui se sont abattues sur la région de Naples ces derniers jours et l'état général du bâtiment soient à l'origine de l'effondrement.

 

 

Pour en savoir plus :

- Court reportage (en italien) relatant l'effondrement

- Photographies diverses de la maison et de ses fresques