Façade principale du palais Garnier, Paris - Source : Google street (photo 2012)
Localisation de la sculpture "La Danse" de Jean-Baptiste Carpeaux - Source : Google street (photo 2012)
La Dance - Source | La sculpture La Danse appartient à un groupe de quatre sculptures présentes sur la façade principale du palais Garnier à Paris : la Danse, la Musique instrumentale, le Drame lyrique, l’Harmonie.
Sa révélation au public, le 27 juillet 1869, provoqua une réaction outrée : comment un groupe de bacchantes, nues, engagées dans une danse déséquilibrée, le tout constituant une sculpture non symétrique et encore moins verticale, pouvait-il représenter la Danse ?
La presse relaye l'émoi des Parisiens quant à cette oeuvre jugée immorale et l'on évoque la possibilité de retirer l'oeuvre de Carpeaux pour y substituer une autre, moins scandaleuse que ces figures féminines qui sentent le vice et puent le vin ("Le Groupe de la Danse de M. Carpeaux jugé au point de vue de la morale, ou Essai sur la façade du nouvel Opéra" par M. C. A. de Salelles).
A la fin du mois d'août 1869, un encrier est jeté contre la sculpture, attentat nocturne et anonyme dans un contexte polémique. (Voir la sculpture tâchée) |
J'ai choisi d'illustrer la polémique en utilisant un texte, rédigé par le directeur de l'hebdomadaire "Le monde illustré", car il reprend quelques éléments de la critique, évoque le climat scandaleux, tout en apportant des arguments en faveur de Carpeaux.
Extrait de l’hebdomadaire « Le monde illustré » n° 645 du 21 août 1869
Nous sommes en France et à l'Opéra, nous sommes au dix-neuvième siècle et sous un ciel tempéré, et nous voulons représenter la danse vive et légère, qui charme les yeux par sa grâce ; c'est cette figure douce et languissante qui effleure les lacs et se pose sur la feuille de nénuphar dans Giselle, ou devient mutine et gaillarde dans le costume de la Vivandière. Le plaisir violent et fort dont vous parlez a son caractère, son type; il a inspiré des chefs-d'œuvre ; il correspond à un rythme, mais ce n'est pas le nôtre. C'est la passion violente qui déborde dans cette danse-là, mais nous voulons de la grâce et de la noblesse. Le rictus de vos danseuses antiques et de vos rudes danseurs se crispe, l'œil s'injecte de sang, les cheveux se hérissent ; mais nous, nous n'allons qu'à la légère émotion du plaisir. Nous sommes la grâce et vous êtes la force. |
Le scandale fut trop fort et les pouvoirs publics demandèrent que l'on retire cette sculpture du groupe au motif de l'indéscence. Une nouvelle commande est passée auprès de Charles Gumery après le refus de Carpeaux d'exécuter une seconde composition. Cependant, la guerre de 1870 éclata et le sujet n'en fut plus un.
En 1964, à cause de la pollution qui la menace, la sculpture originale est retirée de la façade du palais Garnier. C'est une copie réalisée par Paul Belmondo (le père de Jean-Paul, l'acteur) qui est désormais visible. La sculpture originale (La Danse, Jean-Baptiste Carpeaux, groupe en pierre d'Echaillon, H. 420 cm ; L. 298 cm ; P. 145 cm ; 18,2 tonnes) est visible au musée d'Orsay à Paris, allée centrale des sculptures (numéro d'inventaire RF 2884).