10 mai 2009
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Me voilà rendu à la critique littéraire. Et Dieu sait que je ne suis pas naturellement disposé à cet exercice, d'autant plus lorsqu'il touche un éminent écrivain, membre de l'Académie Goncourt. Mais c'est pour critico-blog...
Je vais donc vous dire, simplement, ce que j'ai pensé du recueil "Crime de village" de Jules Renard.
Ce recueil regroupe huit nouvelles : "Crime de village" (éponyme), "Flirtage", "La meule", "Le retour", "A la belle étoile", "Une passionnette", "Héboutioux", "A la pipée".
Dans l'oeuvre de Renard, ces récits sont les premiers, un travail qu'il juge mal dégrossi et qu'il qualifie de "pages de collégien". Nous ne douterons pas qu'il en a une estime un peu plus supérieure, mais la limite existe, il l'affirme d'ailleurs dans sa correspondance (à Bachelin, 24 juin 1905).
Il faut le dire, le style renardien de "Crime de campagne" n'est pas original et pourrait être qualifié de "sous-Maupassant" teinté de Flaubert. Dans l'édition de La pléiade, Léon Guichard écrit que "L'intéret principal de crime de village est bien de marquer le point d'où Jules Renard est parti pour devenir lui-même". Je ne peux qu'adhérer à cette approche, félicitant la création initiale (produite à compte d'auteur), mais en soulignant ses faiblesses.
Renard s'était offusqué qu'on le compare à un auteur "naturaliste" : pourtant, près de 100 années après sa mort, il me semble encore très acceptable que de dire que "Crime de campagne" brille par sa beauté naturaliste. La qualité des descriptions de Renard est notable, scènes de campagnes, de vies rustiques, de tourments ruraux.
Lhermitte, peintre naturaliste, est même cité dans "Une passionnette". Il suffit de rajouter une couche de son maître, Millet, pour être en plein dans le naturalisme pictural, à Barbizon ("ils ont des barbes de bisons...." dit la chanson).
Diable, je vous avais prévenu, je ne suis pas critique littéraire, j'exprime ce que je ressens ! Ici, j'ai vu de superbes tableaux de campagne, mais je me suis ennuyé dans ces histoires, m'attachant peu aux personnages, trouvant "faible" la réflexion sous-jacente à chacune des scénettes, regrettant parfois leur fin brutale, proche de l'inachèvement. Je n'ai jamais autant apprécié les nouvelles de Maupassant qu'à la lecture de ce recueil.
Ne passez pas nécessairement votre chemin, tout n'est pas mauvais : "Crime de village", "La meule", "A la belle étoile" sortent du lot, à mon goût. La nouvelle "Le retour" présente un intéret auto-biographique (Renard s'envisageant revenir à Chitry après un échec parisien).
Citations :
Je vais donc vous dire, simplement, ce que j'ai pensé du recueil "Crime de village" de Jules Renard.
Ce recueil regroupe huit nouvelles : "Crime de village" (éponyme), "Flirtage", "La meule", "Le retour", "A la belle étoile", "Une passionnette", "Héboutioux", "A la pipée".
Dans l'oeuvre de Renard, ces récits sont les premiers, un travail qu'il juge mal dégrossi et qu'il qualifie de "pages de collégien". Nous ne douterons pas qu'il en a une estime un peu plus supérieure, mais la limite existe, il l'affirme d'ailleurs dans sa correspondance (à Bachelin, 24 juin 1905).
Il faut le dire, le style renardien de "Crime de campagne" n'est pas original et pourrait être qualifié de "sous-Maupassant" teinté de Flaubert. Dans l'édition de La pléiade, Léon Guichard écrit que "L'intéret principal de crime de village est bien de marquer le point d'où Jules Renard est parti pour devenir lui-même". Je ne peux qu'adhérer à cette approche, félicitant la création initiale (produite à compte d'auteur), mais en soulignant ses faiblesses.
Renard s'était offusqué qu'on le compare à un auteur "naturaliste" : pourtant, près de 100 années après sa mort, il me semble encore très acceptable que de dire que "Crime de campagne" brille par sa beauté naturaliste. La qualité des descriptions de Renard est notable, scènes de campagnes, de vies rustiques, de tourments ruraux.
Lhermitte, peintre naturaliste, est même cité dans "Une passionnette". Il suffit de rajouter une couche de son maître, Millet, pour être en plein dans le naturalisme pictural, à Barbizon ("ils ont des barbes de bisons...." dit la chanson).
La paye des moissonneurs - Léon Lhermitte
Musée d'Orsay - Paris
Musée d'Orsay - Paris
Diable, je vous avais prévenu, je ne suis pas critique littéraire, j'exprime ce que je ressens ! Ici, j'ai vu de superbes tableaux de campagne, mais je me suis ennuyé dans ces histoires, m'attachant peu aux personnages, trouvant "faible" la réflexion sous-jacente à chacune des scénettes, regrettant parfois leur fin brutale, proche de l'inachèvement. Je n'ai jamais autant apprécié les nouvelles de Maupassant qu'à la lecture de ce recueil.
Ne passez pas nécessairement votre chemin, tout n'est pas mauvais : "Crime de village", "La meule", "A la belle étoile" sortent du lot, à mon goût. La nouvelle "Le retour" présente un intéret auto-biographique (Renard s'envisageant revenir à Chitry après un échec parisien).
Léon Lhermitte - Eau forte
(source : http://peinturesetpoesies.blog50.com)
(source : http://peinturesetpoesies.blog50.com)
Citations :
"Cinq cent francs une vache comme ça, qu'a les yeux noirs, c'est pas cher"
Jules Renard - "Crime de village"
"Mais soudain, la face boulversée du père Moru s'adoucit, et il se mit à rire.
"J'vous ai fait peur, hein, pas vrai, monsieur le curé ? eh ben, tenez, j'suis pas si méchant que vous, car c'est pas pour dire, mais c'est pas bien ce que vous avez fait là. Mais faut pas rendre le mal pour le mal. [...] Venez diner avec moi et n'en parlons plus ; ca y'est-il ?"
Jules Renard - "A la belle étoile"
"Prenez garde, les brimborions, ça attire quelquefois les galants"
Jules Renard - "La meule"
Jules Renard - "Crime de village"
"Mais soudain, la face boulversée du père Moru s'adoucit, et il se mit à rire.
"J'vous ai fait peur, hein, pas vrai, monsieur le curé ? eh ben, tenez, j'suis pas si méchant que vous, car c'est pas pour dire, mais c'est pas bien ce que vous avez fait là. Mais faut pas rendre le mal pour le mal. [...] Venez diner avec moi et n'en parlons plus ; ca y'est-il ?"
Jules Renard - "A la belle étoile"
"Prenez garde, les brimborions, ça attire quelquefois les galants"
Jules Renard - "La meule"